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16 avril 2012 1 16 /04 /avril /2012 21:52

JANIS OTSIEMI

EDITIONS JIGAL

 

le chasseur de lucioleIl me revient une anecdote racontée par un grand chanteur Québécois. Il racontait qu'un jour, interviewé par un journaliste de la Métropole, ce dernier lui avait déclaré à l'issue de l'entretien «  Vous savez, vous parlez vraiment bien le français ! » Et le chanteur, surpris et agacé, de répondre «  c'est normal c'est ma langue ! ».

 

A l'heure où l'académie Française, muséum d'histoire naturelle de la langue française, s'apprête à se rabaisser à étudier la candidature d'un PPDA pour regarnir ses rangs, il est agréable de se rendre compte qu'il existe encore des endroits où cette langue ne sent pas le vieux strapontin ou le formol.

 

Qu'au contraire, elle est encore féconde, et chaque jour réinventée dans la bouche de populations aussi diverses que lointaines. Il en va ainsi en Afrique où la poésie et l'imagination des gens offrent encore à notre langue commune de bien jolis bouquets de mots.

 

C'est la première fois que je m'aventure sur les terres littéraires africaines francophones, et en particulier celles du polar d'Afrique de l'Ouest. Mais avec un titre aussi beau que «  Le chasseur de lucioles », difficile de résister à l'invitation au voyage, à celle de survoler la Méditerranée pour fouler dans l'imaginaire, la terre de ce Gabon que l'on devine riches en couleurs.

 

Et il ne faut pas bien longtemps au lecteur pour se laisser envoûter par le style de Janis679940.jpg Otsiemi, de se laisser aller au sourire quand ses yeux caressent les mots et expressions imagées pour relater une situation qui n'est pas forcément rose dans ce pays de la débrouille.

 

L'intrigue est des plus classique. Deux enquêtes en parallèles, distinctes, qui n'ont pas de liens entre elles.

 

L'histoire d'un braquage d'abord. Celui mené par des jeunes qui n'ont rien à perdre et qui s'en prennent un fourgon de transport de fonds. Et parce qu'ils ont usé d'armes lourdes qui pourraient être utilisées dans une hypothétique tentative de coup d’état , les enquêteurs Boukinda et Evame , gendarmes de leur état, s'attacheront à remonter leur piste sanglante.

 

Prostitue.jpgCelle d'un serial killer ensuite. De cet employé d'assurance qui découvre qu'il est séropositif et qui fou de rage, décide de projeter dans cette mort qui lui est promise , des prostituées, ces lucioles qui lui ont si souvent fait tourner la tête, et dont il soupçonne l'une d'entre elles de lui avoir transmis ce «  Syndrome Inventé pour Décourager les Amoureux » .

 

Ne pas partir seul dans le grand néant rend sans doute la mort moins effrayante. Alors il les éventre à coup de tessons de bouteilles, et les cadavres s'accumulent. Sur sa piste, les policiers Kumba et Owoula, qui n'hésitent pas, quand ils se rendent sur les scènes de crime à extorquer quelques billets aux patrons des lieux pour leur éviter des poursuites pour avoir ouvert une maison de passe illégale.

 

Le lecteur ira au bout de ces intrigues ordinaires. Mais il en trouvera cependant une saveur toute particulière à travers les portraits de cette multitudes de personnages qui peuplent ce roman, et les pratiques hors du commun de cette société urbaine de Libreville.

 

Là bas, point de technologie de pointe. L'interrogatoire musclé tient lieu de test ADN, et leLibreville-Quartier-20Louis-202.jpg flair du flic vaut n'importe quelle expertise scientifique d'une scène de crime. Et la débrouille pour le bien ou pour le mal, tient lieu d'art de vivre contraint.

 

Mais l’intérêt du roman est ailleurs. Si ordinaires soient elles, ces intrigues permettent surtout de mettre en perspective une société gangrenée par des maux communs à beaucoup de pays africains, comme la corruption et la combine, et d'autres qui lui sont propres. Les fondations de la démocratie gabonaise reposent n'ont pas sur le mérite ou les compétences de ses citoyens, mais sur leur appartenance ethnique, qui commande dès lors la distribution des responsabilités de pouvoir. «  Le tribalisme, doublé du népotisme, du clientélisme et de l'allégeance politique est ici un sport national, comme le football l'est au brésil. ».

 

imagesCAEWLRCV.jpgMême si l'histoire méritait une plus grande profondeur , l'escapade en Afrique francophone valait amplement le détours. De la couleur dans les mots, de la poésie dans les images, apportent un vrai bol d'air au lecteur qui sort ainsi des sentiers battus du genre littéraire qu'il apprécie.

 

Janis Otsiemi donne des ailes à cette langue que nous avons en partage , qu'il réinvente et dont il nous régale à travers les dialogues de ses personnages ou les proverbes qui fleurissent au début de chaque chapitre, nous faisant redécouvrir le charme de ses sonorités, la force de ses mots et la magie de ses métaphores.

 

Un auteur qu'il convient donc de découvrir pour mettre un peu de soleil et d'exotisme dans nos lectures !

 

 

 

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Published by La petite souris - dans Auteurs Africains

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