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27 avril 2013 6 27 /04 /avril /2013 18:00

MASSIMO CARLOTTO
Editions METAILIE

a la fin d'un jour ennuyeuxJe dois bien avouer une chose. Depuis des années que je lis de la littérature policière je me rends compte avec le temps que j'ai une faiblesse coupable pour les héros négatifs. De ceux qui n'hésitent pas à exhiber à la face du monde tout ce que l'âme humaine peut avoir de retord, de cupide, de cruel et  de bestial.

 

Giorgio Pellegrini est de ceux là. Pour ceux qui ont eu le plaisir de lire " Arrivederci amore" il retrouveront sans doute avec bonheur, ce salopard immoral qu'ils avaient découvert, et qui n'avait pas manqué de leur montrer au fil de ses aventures d'alors, toute l'étendue de sa malfaisance.

 

Ici point de cavale, de trahison, d'attaque de fourgon. Dans ce nouvel opus notre homme s'est assagi,  s'est acheté avec le temps , l'image d'un homme respectable.

 

Nous le retrouvons à la tête d'un luxueux restaurant, la Nena , qui est devenu incontournable pour les notables du coin tant les vins sont fins et les mets délicieux. Giorgio Pellegrini sait se rendre indispensable pour ces élites de Padanie.

 

D'autant plus indispensable, que derrière la façade respectable de son établissement, une autre activité non moins lucrative s'y développe à leur destination. Celle d'un réseau d'escort girls et de prostitution qu'il a monté avec son ami et associé, l'avocat et député Brianese.

 

Tout aurait pu ainsi perdurer pour le plus grand bénéfice des deux associés. L'unrestaurant-hotel-luxe-italie maintenant à flot son restaurant, l'autre ayant à sa disposition un lieu discret et un atout considérable pour négocier et conclure ses affaires et  entourloupes politiques. Tous ce que compte la Padanie, notables industriels ou politiques se pressant au portillon de ce lieu fait pour eux.

 

Pourtant un soir, un petit grain de sable va enrayer la belle mécanique. Brianese annonce à Giorgio  que les deux millions d'euros que celui ci lui avait confié pour les investir dans un projet à Dubaï sont partis en fumée . Qu'ils ont été grugés , piégés par le même mécanisme qu'avait en son temps manigancé Madoff pour plumer les plus argentés de ses clients.

 

Mais Giorgio ne l'entends pas de cette oreille, et fait pression sur son associé pour récupérer son investissement et les intérêts qui vont avec. La tension monte entre les deux hommes, et pour relâcher celle-ci, Brianèse fait rentrer la Ndrangheta dans la danse. Les mafieux ne tardent pas d'ailleurs à prendre les rennes du restaurant.

 

prostitution.jpgSi Brianèse excelle dans l'art des marchés publics truqués, des détournements de fonds et des combines douteuses, Giorgio Pellegrini traîne derrière lui un passé violent et un instinct de survie animal.

 

Et cet instinct va réveiller en lui de vieux reflexes. Car notre homme n'est pas du genre à se laisser marcher sur les pieds et compte bien défendre ses plates bandes.

 

Le lecteur ne manquera pas de s'horrifier desactes que Giorgio Pellegrini commettra tout au long du roman. Animal froid prêt à tout pour survivre, ne s'embarrassant ni de détails, ni  de la moindre barrière morale, il exécute froidement son plan. Pour lui, ses congénères n'ont de valeur à ses yeux que s'il en tire un quelconque bénéfice ou le servent à  dessein dans sa quête de satisfaction.

 

De fait, le lecteur ne s'étonnera pas de son rapport aux femmes.

 

Considérées au mieux comme des cruches, accessoires de vie dont il faut organiser lerevolver planning dans les moindres détails pour les maintenir en forme, et suffisamment désirantes pour exciter sa libido, au pire, traitées comme du bétail que l'on revend rapidement et sans vergogne à d'autres proxénètes pour renouveler le stock.

 

Mais aussi abjecte que puisse être Giorgio Pellegrini,  on n'en lâche pas le livre pour autant. Car au delà de ce personnage ignominieux qui vaut cependant le détour, c'est un portrait d'une certaine Italie que nous brosse un Massimo Carlotto désenchanté.

 

 Celui d'une société en pleine déliquescence morale et politique,  où l'avidité est érigée en valeur,  la compromission et le chantage en régulateurs de la vie publique, et dont les dernières élections ne sont qu'un énième soubresaut de cette démocratie qui se rapproche toujours un peu plus de l'abîme.

 

Carlotto.jpgMassimo Carlotto est un formidable témoin de son époque, qu'il dissèque avec cynisme et froideur, ne laissant pas la place à une once d'espoir dans cette Italie qui se putréfie de l'intérieur.

 

 Admirable écrivain, formidable conteur d'une époque qui voit nos démocraties perdre leurs repères et institutionnaliser une violence économique et sociale d'où les plus faibles ne sortiront pas indemnes, pendant que volent au dessus d'elles, toujours plus nombreux, les rapaces de la finance, de l'intolérance et de la xénophobie qui attendent patiemment leur heure.

 

Un roman qui ne risque pas de vous ennuyer.

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Published by La petite souris - dans Auteurs Italiens
17 février 2013 7 17 /02 /février /2013 19:00

Andréa CAMILLERI
Editions POINTS

intermittencesN'avez vous jamais nagé au milieu de requins ? Entouré de ces animaux à sang froid qui gravitent autour de vous avec nonchalance, indifférents à votre présence , ne vous considérant que d'un œil distant, mais qui ne vous quitte pas ? Non, sans doute.

 

Alors n'avez vous jamais vécu cet instant fugace où tout bascule, quand le bleu devient noir, qu'autour de vous tout se trouble,  que l'adrénaline vous fait réaliser, bien trop tard hélas, que le danger est là, que de chasseur vous êtes devenu proie, et que les mâchoires du destin se referment sur vous et vous assènent le coup de grâce.

 

Alors peut-être, histoire d'en avoir une idée, devriez vous vous intéresser au roman d' André Camilleri , " Intermittence" qui vient de paraitre en format poche aux Editions POINTS .Car les requins que vous allez y côtoyer n'ont rien à envier à leur congénères aquatiques quant à leur puissance, la  férocité et la bestialité qu'il déploient pour déchiqueter leur proie.

 

Cette faune qu'Adrea Camilleri  vous invite à découvrir c'est celle des milieux industriels et d'affaires italiens, à travers les tribulations qui secouent la société Manuelli.

 

Si officiellement le patriarche et fondateur de la société familiale, devenue l'une des plusbuisnessh.jpg puissantes d'Italie, n'est plus aux affaires, si son fils Bope  a pris la relève, le véritable pouvoir est détenu par le directeur général , Mauro de Blasi et son adjoint Guido Marsili.

 

Malgré la crise qui touche de plein fouet la péninsule, ces derniers travaillent d'arrache pied au rachat d'une société concurrente qui n'a pas su faire les bons choix stratégiques pour se maintenir à flot et supporter le tsunami économique qui s'est abattu sur le tissu industriel italien. 


 

bussiness-.jpgMais on ne laisse pas des piranhas jouer entre eux sans prendre le risque de les voir se retourner contre vous avant de s'entre dévorer.

 

Dans ce monde merveilleux des affaires et de l'entreprise ne survivent que les plus forts, capables de se mutiler de toute notion morale, de tout sens de l'intérêt général.

 

Le sang appelle la mise à mort, la mort appelle le profit. Et celui ci n'en est que plus juteux quand il s'accompagne de licenciements massifs d'ouvriers qui trinquent de leur sacrifice. On est bien loin de l'idéal du vieux Manuelli qui rêvait d'une entreprise à visage humain.

 

Alors on complote, on couche avec la femme de son associé, on lorgne sur la petite fille du concurrent que l'on veut racheter. On ment, on manipule on triche.

 

Mais dans ce jeux de faux semblants, il suffit parfois qu'un petit grain de sable vienne gripper la plus belle des machinations pour que tout se retrouve remis en question. Et il n'y a pas plus dangereux qu'une femme prise pour une cruche.

 

Andréa Camilleri signe là un roman bien différent de l'univers de son célèbre inspecteur Camilleri.jpgMontalbano. Critique acerbe et au vitriole de l'ultralibéralisme, il nous offre un tour d'horizon cruel de cette Italie où les élites politiques forniquent avec les décideurs économiques , où dans ce jeu d'argent et de pouvoir, les ouvriers sont toujours les dindons de la farce.


Mais il le fait avec tout le talent qu'on lui connait, en croquant des personnages ambitieux et sans vergogne,  en parsemant son récit de chausse-trappes, et en n'omettant pas de faire pénétrer le lecteur dans la vie privé de ces prédateurs , ce qui leur donne encore plus de relief.


Trahison, coup bas, coup de gnons, adultère , femme battue et femme déterminée , trafic d'influence,  délit d'initié, rien ne manque à cet univers rempli de prédateurs.

 

Un univers impitoyable, cruel et froid où même un requin peut se faire dévorer.

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Published by La petite souris - dans Auteurs Italiens
15 juin 2011 3 15 /06 /juin /2011 12:42

Gianrico CAROFIGLIO

     Editions SEUIL Policier

 

 

Traduction : Nathalie BAUER

 

le silence pour preuveElle a disparu. Cela fait 6 mois maintenant. Volatilisée. Aucune trace, aucun indice. Une fugue ? L’envie d’un possible ailleurs ? Rapt  crapuleux ? Nous sommes en Italie, pays où le crime est organisé. La tentation est grande pour le lecteur d’aller dans cette direction là.

 

C’est parce qu’ils sont désespérés et qu’ils comprennent que l’affaire va être prochainement classée que les parents de Manuela, parviennent à convaincre Guido GUERRIERI, avocat de profession de reprendre le dossier pour voir si la police ne serait pas passée à côté d’un élément capital dans son enquête sur la disparition de leur fille.

 

Touché par leur détresse celui-ci accepte de jouer les apprentis détectives et de reprendre l’affaire à zéro. Le voilà remontant le cours du temps à la recherche des dernières personnes à avoir vu  ou côtoyé Manuela. Son ex petit ami, avec qui la séparation fut particulièrement explosive,  qui aurait pu faire le suspect idéal, mais son alibi le met à l’abri des suspicions ; Nicoletta et Caterina ses amies avec qui Manuela étudiait à Rome, et Anita, celle qui est la dernière à l’avoir vue vivante, en la déposant à la gare.

 

« le silence pour preuve » marque ma toute première rencontre avec  Gianrico Carofiglio, un auteur italien que je n’avais pas encore eu l’occasion de découvrir jusqu’ici. 

 

Voilà le type de roman policier ( pour un peu le terme même de « policier » serait un peu excessif) indispensable au genre que nous apprécions tant. Car il nous prouve qu’il possible de raconter une histoire sans pour autant devoir se vautrer dans l’hémoglobine, la poudre à canon et la violence à outrance.

 

C’est un roman épuré, profondément humain que nous offre Gianrico CAROFIGLIO . Un roman qui parle d’une histoire simple, banale,  et elle nous est comptée sans artifice, très sobrement. Pas de rebondissement, pas de spectaculaire, de dénouement à couper le souffle. Et ce qui en donne toute sa puissance.

 

L’avocat avance dans cette histoire avec une certaine langueur, à la manière d’une promenade nocturne dans les rues de la ville comme il aime à faire parfois.  Il observe, à l’écoute de ce qui l’entoure, en particulier de ces jeunes qu’il interroge et lui délivrent une partition sans fausse note. Et là, devant cette façade sociale si lisse le rideau des apparences commence à bouger  fébrilement, soulevé  par le souffle de curiosité de  cet avocat.

 

Ce n’est pas tant dans la trame de ce roman que réside à mes yeux l’intérêt de celui-ci que gianrico_carofiglio.jpgdans la complexité insoupçonnée de cet avocat, parcouru par des tourments intérieurs,  qui aime à poser un instant son existence sur la table d’un bar homo pour s’enivrer d’alcool  et retrouver Nadia la propriétaire du lieu, ancienne actrice porno, ancienne call girl qu’il avait un jour défendue,  qui écoute mais pose peu de questions.

 

Et cela va bien à cet avocat ami des livres, pour qui la relation à l’autre n’est pas aussi simple et qui préfère se confier à son sac de frappe quand il enfile des gants de boxe pour se vider l’esprit. Mister Sac est son ami et confident.

 

Un homme à l’âme mélancolique, un peu fatigué , un funambule qui  marche  en équilibre sur  le fil de la vie, et qui navigue à la frontière toujours floue entre le mal et le bien, l’innocence et la culpabilité, à la recherche de cette vérité qu’on veut lui cacher mais dont il devine la présence toute proche.

 

Paradoxalement, on ressort apaisé de ce roman et c’est délicatement que le lecteur referme son livre, la pensée tout à ce personnage et cette histoire simple et cruelle.  

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Published by Eskalion - dans Auteurs Italiens
20 juillet 2010 2 20 /07 /juillet /2010 19:20

« La grâce n’est pas la rétribution de l’aveu. C’est une opportunité de clémence qui prend en compte l’intérêt général qu’il y a de faire cesser une peine spécifique, et seule la confusion démagogique des idées a donné de l’importance au fait que la victime pardonne ou non. La grâce concerne le rapport du seul condamné avec les raisons de la loi. La victime quant à elle a obtenu de la sentence tout ce que celle-ci pouvait lui donner » Guiseppe Maria Berruri, Conseiller à la Cour de cassation ( la Républica, 3 janvier 2003 ) »

 

Ma première critique portera sur un livre qui finirait sans doute dans ma bibliothèque idéale si je devais un jour la constituer. Jamais un roman policier ne m’aura autant dérangé, autant interpellé par la portée philosophique qu’il porte en lui. « L’immense obscurité de la mort » de MASSIMO CARLOTTO, est un roman qui vous hante bien au-delà de sa dernière page.

 

Dans un pays, l’Italie, où le Président de la République n’use jamais de son droit de grâce, c’est à la victime qu’il revient de décider d’accorder ou non le pardon. Un poids terrible et culpabilisant qui pèse sur elle, mais un pouvoir aussi, qui livre l’agresseur à sa merci dès lors qu’elle a sur lui droit de vie et de mort sociale.

 

C’est ainsi que 15 ans après avoir perdu sa femme et son fils, tués lors d’un braquage où ils avaient été pris en otage, Silvano Contin se voit demander une grâce par Raffaello Beggiato , celui là même qui a anéanti sa famille et sa vie. Atteint d’un cancer incurable celui-ci souhaite finir sa vie en homme libre.

 

Ayant abandonné son travail, ravagé par la douleur et le souvenir des derniers mots de sa femme, Silvano Contin n’est plus qu’une ombre sociale. Pourtant, malgré sa douleur, celui-ci va décider d’accorder sa grâce à son bourreau.

 

En effet, Silvano souffre mais il n’a pas oublié, et comprends vite l’intérêt qu’il peut avoir à faire sortir son bourreau de prison. Lors de ce tragique braquage, le complice de Berggiato a réussi à s’échapper et n’a jamais rendu de comptes à la justice. Silvano compte donc sur Berggiato pour remonter jusqu’à lui et découvrir son identité. Malheureusement les choses ne se passent jamais comme on le souhaite et c’est dans le sang que Silvano finira par mettre les mains.

 

Au finale, ce roman c’est aussi l’histoire d’une parabole, celle de deux hommes de chaque côté d’une barrière invisible, ténue, entre le bien et le mal, où l’un finira par perdre son humanité quand le second retrouvera la sienne par un ultime acte d’abnégation.

 

Ecris dans un style incisif, une écriture sèche, MASSIMO CARLOTTO dresse un tableau sans concession d’une société italienne où l’univers de la prison condamne définitivement l’homme qu’elle incarcère. Aucune échappatoire, aucune espérance donnée puisque l’Etat a mis le glaive de la justice dans les mains de la victime, en lui donnant ce pouvoir extraordinaire d’accorder ou non une grâce à leur bourreau.

 

Aussi noir et sombre que puisse être ce roman, il garde me semble t’il une petite lueur d’espoir en l’homme et nous démontre que si la prison emprisonne l’homme pour ses actes, elle ne peut et ne doit pas condamner la valeur intrinsèque de l’être humain.

 

2864245728.jpg « L’immense obscurité de la mort » MASSIMO CARLOTTO éditions Métalié ou en poche collection Point.

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Published by passion-polar.over-blog.com - dans Auteurs Italiens

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